EVENEMENTS DE MADAGASCAR

Publié le par Ny Marina

Je viens d’entendre votre demi-heure sur les événements de Madagascar. J’étais prêt à intervenir, mais vous ne m’avez pas rappelé. L’ona entendu à la fois des sentiments et des préjugés. Qu’un Français, même marié à une Malgache, accuse l’actuel président d’empocher tout l’argent venant de l’aide internationale, montre qu’il ne suit pas les actualités au quotidien. Ce genre de clichés renvoie à une attitude beaucoup plus profonde qui est celle de la supériorité du bailleur de fonds — au moins potentiel — sur le sauvage qui n’est mû que par son instinct et sa cupidité. L’on sait que, fréquemment, Ravalomanana utilise son argent personnel pour des actions que devrait financer l’Etat. Mais ce genre de propos, qu’il s’agisse de faire appel à la psychologie des individus ou d’affirmer des clichés que tout auditeur de RFI admettra sans critique et uniquement comme des éléments d’information, est, me semble-t-il, bienvenu sur RFI. Rappellerai-je qu’Olivier Pégui avait si bien assimilé le discours mis au point par plus d’un demi-siècle de colonisation et qu’il avait été si bien encadré par le groupe des familiers de Ratsiraka, que ses propos hérissaient le poil de beaucoup des auditeurs de RFI à Antananarivo. Personnellement, je n’ai pas regretté qu’il disparaisse de la scène radio. Mais ses remplaçants n’ont pas innové dans leurs commentaires et dans le choix de leurs sujets. Depuis l’expulsion d’Olivier Pégui, ses divers remplaçants ont gardé les mêmes préjugés et sans doute les mêmes réseaux d’information. Depuis quinze jours, RFI m’a longtemps semblé égale à elle-même et ne s’est pas privée, avec l’« honnêteté » et l’« objectivité » des journalistes, de jeter de l’huile sur le feu jusque dans la soirée du lundi 26 janvier où l’on a pu entendre quelques-uns des propos de Mox Ramandimbilahatra. Ces propos d’un très grand calme étaient diffusés, alors que de ma fenêtre, je voyais brûler sa maison. Elle avait été pillée le matin, le « travail » fut achevé le soir. Au moment de la diffusion, je ne sais pas si Mox savait ce qui arrivait à sa maison. A se demander si ce tournant dans votre « objectivité » fut le résultat d’une intervention extérieure à votre petit milieu ronronnant sur lui-même. Revenons à Madagascar, il est évident que l’on peut parler de crise. Mais de quel type de crise s’agit-il ? Sociale, économique, politique ? En fait, le milieu économique et social se prête bien à une action politique d’importance. Le pillage des magasins ou des maisons des particuliers n’a rien d’extraordinaire. On peut, si on le veut, parler d’« émeute de la faim », les journalistes comprendront que les événements de Madagascar sont analogues ou semblables à ceux d’Afrique., sans vouloir se souvenir ou rappeler à leurs auditeurs qu’à Madagascar, les fonctionnaires ont toujours reçu leurs salaires selon le calendrier normal, même s'il est arrivé qu’il y ait des retards de versement d’une semaine et une fois d’une dizaine de jours. « Emeute de la faim », l’expression n’est pas mauvaise, car elle banalise l’événement. Mais on oublie que, déjà dans la nuit des temps malgaches, le pillage des vaincus était normal et coutumier. Les Codes malgaches du 19e siècle prévoyaient que les crimes les plus graves étaient accompagnés de ce que nous appellerions la confiscation des biens. Les codes disaient « ary lanina ny fananana », en fait les biens des condamnés étaient pillés et les maisons (trano kotona) étaient démontées et emportées. Si l’on entre dans la nature des événements récents, on voit une différence avec le passé, même le passé proche lors des rotaka de l’époque Ratsiraka. Le pillage n’y suffit plus, les bâtiments sont incendiés. Concernant les établissements de Magro, le but est évidemment de faire disparaître des paysages urbains toutes ces marques des actions de développement auxquelles Ravalomanana a attaché son nom. Souvenez-vous que la justice française ne s’était pas contentée de condamner Ravaillac à mort — et dans les pires conditions qui étaient celles de l’époque —, sa maison natale avait été détruite, sa famille contrainte à l’exil et le nom de Ravaillac proscrit du Royaume. Ce ne peut pas être le but de ce jeune homme d’affaires francophile qu’est Andry Rajoelina , qui se présente comme favorable à tous les investissements et pour une plus grande ouverture du pays à toute nouvelle entreprise. Alors d’où vient cet acharnement ? Si l’on rassemble les différents éléments : jets de cocktails molotov par des étudiants dans la semaine précédant les manifestations convoquées par le maire d’Antananarivo, campagne de désinformation sur Radio Viva, appel à des réseaux sur l’ensemble de l’île qui mobilisent les réseaux de l’Arema, présence auprès d’ Andry Rajoelina de spécialistes de l’agitation, tout cela donne un parfum de ratsirakisme à tout ce mouvement. Si l’on se souvient aussi que la société de communication d’ Andry Rajoelina , Injet, fut au départ financée par l’entourage de Ratsiraka, et que le maire d’Antananarivo était en décembre à Paris avec l’ancien président dont la TV Viva diffusa son appel à la révolte. Il faut bien se rendre à l’évidence : Andry Rajoelina n’est, pour le moment, que l’homme de paille de l’« Amiral ». Ratsimatahobitsika
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