LES SUCCÈS RADZOUËLIENS, un vrai bonheur !!!

Publié le par Ny Marina

Notre nouveau « gouvernement » se pose sur la scène internationale. Il vient d’envoyer une note verbale à toutes les représentations diplomatiques et consulaires à Antananarivo pour donner les preuves de sa légalité. La note verbale est accompagnée d’un dossier de pièces justificatives. C’est un pas de fait dans la reconnaissance par les pays amis. Mais les diplomates ont souri, quand ils ont ouvert la correspondance.


La note verbale est en fait un texte écrit, mais qui doit l’être selon des normes qui sont connues de toutes les chancelleries. Diplomates et consuls ont souri – le rire en ce cas ne doit pas être visible sur les visages diplomatiques –, et se demandent s’ils vont se concerter pour offrir un stage de formation aux décideurs qui entourent le plus jeune président non-élu du monde, et pour décider qui encadrerait ce stage. Cela demandera du temps, car il faudrait d’abord rédiger un projet, puis trouver un financement et enfin signer une convention. Cela va demander du temps.


Quant au dossier qui accompagnait la note verbale, il comprenait la photocopie de l’ordonnance signée par Ravalomanana, la décision de la HCC et le programme économique du « gouvernement ». La photocopie de l’ordonnance était parfaite ; quant à le décision de la HCC, c’était une sorte de brouillon sur lequel il y avait des sortes de signatures.


Enfin, une feuille voulait présenter ce qui était le programme économique. En fait, ce n’était qu’une liste – une sorte de pense-bête – d’une dizaine de points que le « gouvernement » devrait traiter en urgence pour redresser la situation et relancer l’activité. Ce pense-bête a été rédigé par un opérateur économique et remis à l’un des membres de l’entourage du plus jeune putschiste du monde. On se demande à quoi sert Zazah Ramandimbiarison dans cette Transition. Peut-être est-il occupé à traiter de problèmes ancillaires et à répondre aux propositions et questions saugrenues des dinosaures qui gravitent dans la nébuleuse d’Ambohitsorohitra.


La position intérieure du « gouvernement » est bien assurée par l’union des militaires autour du plus jeune président non-élu du monde. On sait que l’armée reprochait au Président Ravalomanana de ne pas avoir respecté les hiérarchies internes et les listes d’attente ou d’aptitude pour accéder aux fonctions supérieures. C’est cette partialité et cet exercice du pouvoir personnel qui avait provoqué la mutinerie des éléments du Capsat. Depuis, l’armée est satisfaite. Le nouveau chef d’Etat-major a joué à saute-mouton en passant d’un seul saut au dessus de 200 officiers qui espéraient des promotions. Et le bruit court maintenant qu’un nouveau chef de la gendarmerie serait nommé. Rajoelina ne lui ferait jouer à saute-mouton que par dessus 50 officiers plus gradés que le futur impétrant. L’armée est parfaitement satisfaite de ces promotions et en parle beaucoup. Mais il faudra conscientiser ces officiers pour qu’ils montrent toute leur satisfaction. Après les années Ravalomanana, la grande muette doit réapprendre à sourire et à être heureuse.


Quant au plus jeune putschiste et président non-élu du monde, il inaugure un nouveau protocole, sans doute tout à fait conforme aux demandes ancestrales. Il s’est rendu chez Albert Zafy et a discuté trois heures avec lui. Zafy n’est pas d’accord avec l’orientation de la Transition. Il n’a pas été convaincu par les arguments du jeune DJ. Les mauvaises langues, qui n’ont rien compris au progrès, s’étonnent de voir un chef d’Etat se déplacer ainsi, même pour rendre visite à un ancien vrai chef d’Etat et Président élu, qui va avoir 82 ans le jour prochain de la fête du Travail. Ils y voient la démarche d’un patron de société de communication à la recherche de clients pour l’un de ses panneaux publicitaires.

Ah ! qu’il est difficile d’être chef d’Etat à 34 ans !


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Le nouveau régime est jeune lui aussi, mais il a déjà de belles réalisations à son actif et un bel avenir qui rendra les Malgaches heureux dans leur pays.


Son plus beau succès est dans le domaine sanitaire, où l’on peut déjà envisager le progrès de nos statistiques. Les événements troublant l’esprit de nos compatriotes les plus vulnérables, on savait bien que le nombre d’AVC, accidents neuro-vasculaires, allait augmenter. C’était évident et il n’était pas besoin d’aller consulter un mpanandro ou un mpiandry pour le savoir. Les statistiques sont satisfaites et la courbe des AVC va augmenter dans les tableau de l’Instat.

Mais il y a mieux. C’est la croissance – exponentielle ? – des cas de fièvre typhoïde. Cela se comprend avec la malnutrition des deux derniers mois – sauf pour les casseurs professionnels –, avec la disparition de l’hygiène et des moyens de se laver, avec la pluie, avec l’accumulation des ordures sur les dépôts du même nom, qui – à mettre aussi à l’actif du plus jeune président non-élu du monde – vont continuer à orner les coins de nos rues d’une façon tout à fait égalitaire, puisque même les quartiers dits résidentiels en ont eux aussi le bénéfice. Ce qui permet d’envisager aussi un autre progrès tout à fait prévisible : celui des cas de peste pulmonaire avec les bienfaits de la multiplication de la population murine.


Un bel avenir est prévisible pour la majorité de nos compatriotes qui vivent à la campagne. Une dame vétérinaire nous racontait son effroi – ne nous étonnons pas, ces gens de l’ancienne génération ne comprennent rien au progrès et restent des nostalgiques du temps passé qui aurait toujours été celui de la « belle époque » –, une dame vétérinaire nous racontait donc son effroi d’avoir entendu, dans une réunion professionnelle où était abordés les problèmes de l’enseignement agricole, un jeune ingénieur trentenaire et tgviste de surcroît – ce qui ne gâche rien –, de l’âge donc de notre jeune président non-élu, déclarer que les paysans n’avaient pas besoin d’écoles, qu’il leur suffisait d’avoir une bêche et d’aller travailler la terre qui, elle, ne manquait pas. Voilà un bel expert tgviste digne des plus hautes fonctions. Il faudrait au plus tôt le signaler à Ambohitsorohitra et le nommer Directeur Général de l’Agriculture avec un salaire et des indemnités doubles et triples. Par la même occasion, il faudrait se débarrasser de l’ancien génération ravalomananiste qui encombre encore les services administratifs et qui n’a rien compris à l’esprit du temps. Il faudra trouver quelques belles jeunes paysannes repiquant le riz et quelques beaux jeunes gens trayant des ombivavy malagasy et en faire de beaux panneaux de 4 sur 5 mètres que l’on mettra dans chacun des fokontany. Il est inutile de lancer un appel d’offres, car il est une entreprise de communication qui est experte dans la chose et qui sera capable de garnir les 16.000 fokontany de la Grande Île.


Heureuse décision du « gouvernement », il fait vendre à Antananarivo – en cette époque radzouëlienne, ne devrait-on pas dire Tananarive ? L’on attend la décision du « ministre » de l’éducation en matière de langue française – du riz à 500 Ariary ou 2.500 Fmg le kg. Ça fait bien sûr des heureux parmi les consommateurs. C’est bien visible en ville. Mais il faut aussi envisager les conséquences pour la campagne à qui l’on ne vend pas de riz, mais à qui l’on achète le paddy. Si le prix est maintenu, l’on achètera le kg de paddy à 100 Ariary ou 500 Fmg aux paysans, car il faut aussi compter les frais de la collecte, du magasinage, du blanchiment, du transport et de la commercialisation. A ce prix, le paysan aura compris qu’il n’a plus intérêt à en produire et à la vendre. Nos paysans qui, eux aussi, sont intelligents, comprendront qu’ils ont intérêt à ne produire que pour eux-mêmes et leurs familles. Ils n’auront plus à ahaner sur leurs rizières, à les labourer, les repiquer, les surveiller et faire les récoltes. Ils seront enfin heureux. Peut-être même pourra-t-on leur vendre du riz birman ou indien à ce tout petit prix.


Vivre heureux dans l’Île Heureuse, ce sera bientôt possible grâce à Air-Mad. Les employés d’Air-Mad tgvistes ont eu l’heureuse – oui,  encore, vous avez bien lu : heureuse – initiative de congédier leur Directeur Général. C’était un vazaha – il est maintenant inutile de mettre une majuscule à ce mot –, maintenant il est parti. Autre heureuse initiative des tgvistes d’Air-Mad : ils ont congédié leur Conseil d’Administration. Sans DG ni CA, Air-Mad n’a donc plus aucun responsable pour signer les chèques et les accords de location des avions, avec une signature qui engage la responsabilité de la Compagnie. Car notre grande Compagnie nationale a un riche patrimoine : elle possède des bâtiments – mais les bâtiments ne volent pas – et des avions qui volent, c’est-à-dire au total quatre, oui je dis bien quatre Twin Otter. Quand va venir le renouvellement des contrats ou les chèques à faire, comme il n’y a plus de responsables, les contrats ne seront pas renouvelés ni les dettes honorées. Et les horribles sociétés propriétaires des avions pourront les retenir lorsqu’ils atterriront à Roissy, Bangkok, Maurice ou La Réunion. Il nous restera aussi Air Force One Number Two, si tant est que nous en soyons propriétaires. Allons-nous le vendre ?


Mais qu’avons-nous besoin d’avoir des avions long courrier ? La Sadc veut-elle nous exclure ? Nous la quittons sans rien demander de plus. L’Union Africaine dit du mal de nous tout comme l’Europe. Bientôt nous les quitterons aussi, tout comme l’Onu dont on nous a déjà dit que c’était un machin. Enfin, nous allons vivre heureux à Madagascar en communion avec tous nos heureux paysans.


Le nouveau bonheur n’atteindra les campagnes que progressivement, les radzouëliens commencent à l’installer en ville. Des usines ferment, des patrons ne peuvent plus payer les impôts, des patrons malgaches refusent de répondre aux exigences de racket et expédient femme et enfants en Europe pour qu’ils ne soient pas pris en otage, qu’à cela ne tienne : les employés à bas salaire de toutes les entreprises franches ne vont plus être contraints d’aller s’esquinter à user leurs forces dans des ateliers inhumains pour des salaires de misère, voilà le Nouveau Bonheur. On doit lui mettre des majuscules.


Pour vraiment être heureux, non pour vraiment être Heureux, ils nous faut faire la chasse aux mercenaires. Ils peuvent arriver par bateau ou par avion. Soyons vigilants. Ce n’est pas nouveau. Déjà en 1975, alors que des archéologues américains et malgaches faisaient le tour des anciens sites à fossés de l’ancienne époque, ils avaient été justement dénoncés auprès du ministère de l’Intérieur, parce que ces espions venaient étudier nos systèmes de défense et de fortifications. Avec un mandat de perquisition donné par un procureur très vigilant, l’armée, la gendarmerie et la police sont hier allées perquisitionner QMM à Fort-Dauphin – il ne faut plus dire Taolagnaro. Ils ont demandé la liste de tous les vazaha que l’on dit employés par QMM, ont vérifié les identités et ont cherché des mercenaires et des armes. Mauvais tgvistes, ils n’ont encore rien trouvé, ni mercenaires ni armes. Un avion est arrivé d’Afrique du Sud. Tous les voyageurs ont eu droit à une fouille complète de même que tous les bagages. Rien n’a été trouvé ni mercenaires ni armes ni munitions. Décidément ; ces mercenaires sont vraiment de vrais rusés. Le « gouvernement » va aussi aller fouiller les accords signés avec Rio Tinto par Ratsiraka. Si on y trouve des mercenaires ou des armes et munitions, là on saura bien les mettre à l’amende, à de fortes amendes, car on a besoin de réalimenter les caisses de la Banque Centrale.


L’avenir est au vrai Nouveau Bonheur.


Ratsimatahobitsika

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